Après la retraite de Roger Moore, la production EON décide de donner, enfin, sa chance à Timothy Dalton, pisté depuis la fin des années 60. Viendra ensuite Pierce Brosnan, qui aurait pu jouer les deux films de Dalton, s’il n’avait pas été faux détective privé et vraie star de la série Les Enquêtes de Remington Steele.
A Ha – The living daylights (Tuer n’est pas jouer / 1987)
Si la collaboration entre Britanniques a été un rêve avec Duran Duran, celle avec A Ha s’avérera plus difficile pour John Barry, de l’aveu général. Les deux parties ont eu tant de désaccords qu’A Ha réenregistrera The living daylights quelques mois plus tard avec ses propres arrangements.
Pourtant, le postulat était le même que pour A View to a kill : au groupe la création du matériau de base, la chanson, les paroles, la mélodie. A Barry les arrangements de cordes pour ajouter le côté bondien. Mais ces arrangements ne plaisent pas à A Ha. Du moins jusqu’à ce que bien plus tard l’un des membres du groupe ne reconnaisse le travail du Britannique. Alors que jusque là le groupe estimait qu’il n’avait même pas à être crédité.
Aujourd’hui encore, la chanson, qui a fait numéro 5 au Royaume Uni (et n°1 en Norvège, mais est-il nécessaire de le préciser ?) demeure l’une des chansons les plus jouées dans les concerts du groupe.
Pour John Barry, ce sera sa dernière apparition dans la musique de James Bond. Il obtiendra en 1991 son 5e Oscar pour la musique, fabuleuse, de Danse Avec Les Loups.
Gladys Knight – Licence to kill (Permis de tuer / 1989)
Composée et écrite par Narada Walden (futur batteur de Journey) et Walter Adanasieff (producteur plus tard de Hero pour Mariah Carey puis de My heart will go on, pour la BO de Titanic), la chanson est proposée à Gladys Knight. La chanteuse américaine a déjà, à l’époque, 4 Grammy Awards (7 au total dans sa carrière), et est surnommée l’impératrice de la soul !
La chanson, totalement dans l’air du temps, entre pop et rnb, fera un Top 10 en Grande Bretagne. A noter que l’enregistrement verra l’apparition d’un chef d’orchestre très orienté pop, rock, voire metal, Michael Kamen. Un chef bientôt à la tête de la musique de Robin des Bois, prince des voleurs, puis du double album symphonique S&M de Metallica.
Tina Turner – Goldeneye (Goldeneye /1995)
Nouveau Bond, nouvelle décennie, bientôt un nouveau siècle. Que ce soit pour le film ou sa musique, la production EON marche sur des oeufs. Si le choix de l’interprète, Pierce Brosnan, a été assez facile, le choix du compositeur se porte sur le français Eric Serra (qui a signé la BO de nombre de films de Luc Besson). Mais la chanson, ce sera pour le duo Bono / The Edge, soit la moitié du groupe U2. Pour l’interprète, la légendaire Tina Turner. C’est d’ailleurs elle qui a été contactée avant le duo irlandais. Et après le refus d’un autre géant, Depeche Mode, pour une incompatibilité de calendrier.
Et la chanteuse a avoué il y a quelques années avoir dit oui à la chanson, « malgré la pire démo qui soit ». Poursuivant son propos, Tina Turner a confié ne pas savoir comment chanter Goldeneye, ne pas en comprendre la finalité. Alors elle l’a chantée comme elle la sentait. « Et même Bono a été impressionné », a-t-elle conclu dans cette interview accordée à la BBC.
Goldeneye, la chanson, est un carton mondial. Avec ses réminiscences de Goldfinger, elle fait un top 5 dans de nombreux pays. Certaines mauvaises langues diront même que Goldeneye est la dernière bonne chanson écrite par Bono et The Edge… Ce sera aussi l’un des derniers succès de Tina Turner.
A noter que Nicole Sherzinger a fait une reprise de Goldeneye pour le jeu vidéo du même nom publié en 2010.
Sheryl Crow – Tomorrow never dies (Demain ne meurt jamais /1997)
Alors connue mondialement, la chanteuse américaine n’aurait pas forcément dû interpréter la chanson générique du film. Une autre chanson homonyme, interprétée par sa compatriote K.D. Lang. Cette version deviendra Surrender, et on peut l’entendre à la fin du générique.
La chanson de Sheryl Crow a été cocomposée et écrite par elle et par le producteur américain Mitchell Froom, connu pour son travail avec Crowded House, dont il est désormais le clavier, mais aussi Paul McMcartney, Randy Newman, Tasmin Archer, Robin Gibb (Tee Gees) et d’autres dizaines d’artistes.
Tomorrow never dies réussit le pari de combiner l’ambiance bondienne et le style pop/rock habituel de la chanteuse. Elle sera nommée aux Golden Globes, devant s’incliner devant My heart will go on (Céline Dion /Titanic).
Mais K.D.Lang et Sheryl Crow n’ont pas été les seules à proposer leurs services pour Tomorrow never dies. On en reparlera plus tard.
Garbage – The world is not enough (Le monde ne suffit pas / 1999)
Ambiance jazz et presque lynchienne dans cette chanson. Et le groupe, lui, marque assez symboliquement ce qu’est devenue la franchise Bond, « artisanat » anglais et grosse production américaine en même temps. Puisque Garbage est un groupe américain, mené par le producteur Butch Vig, à qui l’on doit quelques uns des meilleurs albums de rock alternatif des 90s. Et Shirley Manson, la chanteuse, est, elle, écossaise. Comme James Bond. Comme Sean Connery. Comme Lulu, aussi, d’ailleurs.
C’est le compositeur du film, David Arnold, qui a créé la chanson. Répondant à la demande du réalisateur Michael Apted de créer une chanson d’amour comme a pu l’être Nobody does it better sur L’espion qui m’aimait. Don Black, déjà auteur de plusieurs Bond-Song est à ses côtés pour les paroles. L’originalité vient du point de vue exprimé : c’est celui d’Elektra King, un point de vue de la méchante du film, dominatrice et manipulatrice.
Dans une interview, David Arnold confiera que lorsqu’il a proposé la chanson à Shirley Manson, il n’a « jamais entendu quelqu’un crier comme ça » de toute sa vie ! La chanteuse demandera au compositeur une légère modification. De celles qui changent un Bond. Comme ce Tomorrow never lies devenu Tomorrow never dies. Ici, « I know when to kiss and I know when to kill » devient « We know when to kiss and we know when to kill », bien plus proche de la relation quasi sadomasochiste entre Elektra King et James Bond.
La chanson a été produite sous deux versions : la version bondienne, pour le film, et une version plus rock, pour l’album de Garbage.
Madonna – Die another day (Meurs un autre jour / 2002)
Sheena Easton avait eu les honneurs d’apparaître pendant le générique d’ouverture de James Bond (Rien que pour vos yeux). Madonna, elle, aura même un petit rôle dans Meurs un autre jour, dont elle signe la chanson-titre. Une chanson bien plus madonnesque que bondienne, du reste. Et ce n’est pas une surprise. Madonna ayant puisé dans les démos de son album alors en travail, American Life, avant de « bondifier » le tout.
Pour le 20e Bond, la production a choisi une star totalement reconnue. Madonna a donc été le premier choix. Ironiquement, la Ciccone vient d’obtenir un joli succès pour une autre chanson d’espion, en 1999 : Beautiful Stranger, pour Austin Powers, l’espion qui m’a tirée.
C’est le producteur et DJ français Mirwais (ex. Taxi Girl), collaborateur régulier de Madonna qui est derrière la chanson. Morceau électro, c’est très novateur pour un James Bond. Et à la demande de Michael Wilson, Madonna a vu les rushes du film, en cours de montage, pour la convaincre d’intituler la chanson de la même façon que le film, ce qu’elle refusait dans un premier temps.
Et comme Madonna est Madonna, la chanson sortira plus tôt que prévu, a priori du fait de l’artiste. Obligeant à changer tout le plan média…
La critique sera assez mitigée, parfois très dure, certains estimant que Madonna venait de réaliser le parfait anti-thème bondien. 20 ans après, avec du recul, on a le sentiment que cette chanson restera aussi bas au panthéon bondien que le rôle de son interprète dans le film.
Pour en savoir plus sur James Bond :
https://jamesbond007.net
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Pour retrouver les autres articles sur l’histoire des chansons iconiques de la saga James Bond :
http://myskeuds.eu/index.php/2022/07/11/lhistoire-des-chansons-iconiques-de-la-saga-james-bond-1-5/