Depuis quelques années, les albums hommages pullulent dans les bacs et sur les sites de streaming.
Pour les maisons de disques, la recette est magique : utiliser le catalogue d’un artiste dont les chansons sont déjà super connues via des nouveaux artistes ou quelques autres sur le retour.
Et le public, fan des chansons originales ou des reprises achète !
Il y a aussi les artistes qui pensent rendre hommage à une personne qui les aura (bien malgré elle, selon le résultat) inspirés. Mais qui, au contraire, la font se retourner dans sa tombe ou mourir une deuxième fois. Heureusement, tous ne chantent pas plus haut que leur ut. Qu’en serait-il si Mariah Carey se prenait pour Maria Callas ? On en frémit.
Et chez nous, heureusement qu’un Bruel n’a pas pensé à (dés)honorer Barbara, qu’un M.Pokora n’a pas noyé dans sa baignoire un Claude François encore en pleine lumière !
Ah… on me dit que pour les deux derniers-cités, ça a été fait. Mal fait. Sans surprise, donc.
Mais après ? Hé bien, on s’aperçoit que le ramage ne se rapporte en aucun cas au plumage, et que les plumes, c’est le consommateur qui les laisse à la caisse ou sur son site de téléchargement favori.
Pourtant, il existe des albums de reprises plus que dignes, voire parfois totalement indispensables. Comment ces albums naissent-ils ? C’est très simple. Un artiste ou un directeur artistique se réveille un matin en se disant qu’il serait bon de rendre hommage à Pierre, Paul ou Jacques. Mais au contraire du directeur artistique déjà penché sur ses chiffres de vente, celui-ci va réunir des artistes qu’il sent concernés par ledit hommage. Des artistes qui, pour une raison ou une autre, ont un lien tangible avec l’artiste repris. Et qui, de reprise quasi à l’identique en version totalement déconnectée, donnent le sentiment d’avoir mis leur âme en réinterprétant l’original.
Myskeuds a listé quelques albums de reprises qui valent le détour !
Pin Ups – David Bowie (1973)
Nous sommes en 1973. David Bowie vient il y a quelques mois de tuer Ziggy Stardust, avant de donner naissance à Aladdin Sane. Au total, le chanteur britannique a publié déjà 5 albums en 4 ans.
Il décide de rendre hommage à ses idoles de jeunesse à travers 14 titres, qui vont du rock à la chanson française (du moins dans la réédition de 1990). Au programme : The Yardbirds (Shapes of things), The Pretty Things (Don’t bring me down), The Who (I can’t explain) ou The Kinks (Where have all the good times gone). Bowie se réapproprie alors tout ce travail. Le « bowise », en crée un ensemble quasi conceptuel. Rarement un album de reprises n’aura autant sonné comme le travail d’un seul artiste, faisant presque oublier les sources contributrices.
Mais tout n’est pas allé comme le souhaitait l’artiste. Puisque Bowie voulait reprendre Growin’up de Springsteen. Il lui a même fait alors écouter sa maquette… Mais devant la moue du futur boss, il a préféré abandonner. D’où la chanson publiée finalement en 1990.
Et un mot de la chanson française, Amsterdam, où il n’est pas loin d’atteindre le même tourment que Jacques Brel. Même si l’autre version anglophone de Scott Walker (1967, sur une traduction de Mort Shuman) lui reste aujourd’hui encore supérieure.
Le morceau de bravoure : Growin’up – Bruce Springsteen
Two Rooms – Elton John / Bernie Taupin (1991)
Cet album a en apparence tout d’une escroquerie. Rappel des faits : au début des années 90, George Michael cartonne avec sa reprise de Don’t let the Sun go down on me d’Elton John. Et Two Rooms sort dans la foulée. Bilan : un paquet de fans vont acheter cet album hommage sur lequel il y a George Michael. Et il y a Don’t let the sun go down on me. Mais pas ensemble. L’ex Wham y interprète Tonight, alors que la chanson est mise en beauté soul par Oleta Adams.
Bon, passé ce fait divers, Two Rooms est sous-titré « celebrating the songs of Elton John & Bernie Taupin », Bernie étant le parolier de quelques unes des plus belles chansons du Rocket Man.
Et pour le casting, c’est la crème de la crème et quelques jeunes alors en vogue (les Wilson Philipps, filles de Mamas, de Papas et de Beach Boys).
Ce casting, le voici : Clapton, Sting, Kate Bush, The Who, Bon Jovi, Tina Turner, Rod Stewart, Phil Collins, Sinead O’Connor et biensûr Joe Cocker, l’homme-qui-reprend-les-chansons-mieux-que-son-ombre.
Dans le livret, chaque interprète explique son choix, souvent très pertinent. Pour des résultats magiques. Rocket Man en douceur mystique par Kate Bush, Sorry seems to be the hardest word par Joe Cocker, Saturday night’s alright for fighting par The Who, Crocodile Rock par The Beach Boys. Et des titres moins connus, prouvant la connaissance par leurs interprètes du répertoire de Sir Reginald : Levon (Bon Jovi), Philadelphia Freedom (Hall & Oates)…
Le morceau de bravoure : The bitch is back – Tina Turner
I’m your fan – The songs of Leonard Cohen (1991)
Reprendre Leonard Cohen : faut-il seulement être fou ? Etre immédiatement hermétique à toute critique ? Reprendre le génie poète montréalais relève de la gageure. Et c’est le casting impressionnant ici réuni qui réussit cet exploit. Diversité des origines, des voix, des styles musicaux : tout est fait pour réinterpréter Leonard Cohen sans écorner le mythe.
En résulte un album étonnant, où l’hommage prend tout son sens. Si personne n’est subjugué par la puissance des chansons, on sent à chaque note l’immense respect des contributeurs. A l’exception de l’un d’entre eux, John Cale, qui ira chercher Leonard Cohen sur ses terres… On y reviendra.
L’album débute par First we take Manhattan, chanson synthé 80s passée à la sauce rock par R.E.M. Ian McCulloch s’attaque avec bonheur à Hey, that’s no way to say goodbye pendant que Geofrey Oryema prête sa voix si sensible à Suzanne. On trouve aussi dans cette auberge espagnole Lloyd Cole (Chelsea Hotel), The House of Love (Who by fire), Nick Cave & the Bad Seeds (Tower song) et même un Frenchie, dont ce doit être la seule participation à un tribute album : Jean-Louis Murat, pour un très personnel Avalanche IV.
Et puis, il y a la finale. LA chanson devenue immortelle de Leonard Cohen : Hallelujah. Publiée initialement en 1984, elle n’avait pas suscité de gros succès jusqu’alors. Mais John Cale (ex Velvet Underground) va la réaranger, et même la redécouper, enlevant quelques strophes du texte initial. C’est cette version qui est aujourd’hui acceptée comme la version officielle de la chanson, celle qui a été popularisée quelque temps plus tard par Jeff Buckley. Le travail de John Cale sur cette chanson est si important que la version reprise par tous les artistes aujourd’hui est celle de John Cale. A tel point qu’on peut parler d’une chanson de John Cale inspirée par Leonard Cohen !
Le morceau de bravoure : Hallelujah – John Cale
If I were a Carpenter – The Carpenters (1994)
Le duo folk-pop The Carpenters est certainement parmi les groupes les plus mésestimés de l’histoire de la pop. Une musique lumineuse, inspirée, des mélodies et des arpèges parmi les plus beaux créés à l’époque, et même depuis.
Et en ce milieu des 90s, alors que le grunge commence à toucher à sa fin, que MTV est la grande chaîne TV rock, sort ce tribute album. Dans lequel des groupes qu’on n’aurait pas du tout soupçonnés d’apprécier le travail de Karen & Richard Carpenter remettent le travail sur l’ouvrage pour sortir des perles, presqu’aussi belles que les originales.
The Cranberries quittent leur Zombie (leur gros succès de l’époque) pour s’attaquer au monument Close to you. Le fuzzy Grant-Lee Buffalo s’attaque à la douceur We’ve only just begun avec un spleen si poétique. On trouve aussi au casting The 4 Non-Blondes, Sheryl Crow, Sonic Youth (Superstar, à mille lieues de l’originale et ses arrangements soul) ou les oubliés American Music Club, Shonen Knife, Diswhalla.
Le morceau de bravoure : Superstar – Sonic Youth
Encomium – Led Zeppelin (1995)
L’exemple type de l’album fait pour surfer sur la vague avec les artistes-du-moment, et qui finalement devient intemporel.
Encomium est publié en 1995, alors que MTV diffuse encore un paquet de chansons rock, indie voire metal. Bref, trèèèèèès inspirées par le travail du grand ballon dégonflé 15 ans plus tôt un soir de biture de trop pour John Bonham…
Sur la gelette, le gratin MTV de l’époque : Hootie & The Blowfish (qui écoule pendant ce temps son Cracked Rear View par palettes entières, 4-Non Blondes avec à sa tête Linda Perry déjà tisseuse de tubes, Duran Duran, Blind Melon (dont le leader Shannon Hood décédera peu de temps après cet enregistrement), Helmet (popularisé deux ans avant par la BO de The Crow), Sheryl Crow ou Tori Amos, qui aura carrément droit au duo avec Robert Plant.
Les artistes présents ont choisi parmi les classiques du groupe (Misty Mountain Hop pour 4-Non Blondes, Thank you pour Duran Duran, Hey hey what can I do pour Hootie & The Blowfish) ou parmi des chansons un peu moins connues (Four sticks pour Henry Rollins et son Rollins Band, Custard Pie pour Helmet). Mais personne n’a osé toucher aux chansons les plus mythiques que son Black Dog, Immigrant Song ou le graal de tout rockeur, Stairway to heaven, encore plus sacralisé deux ans auparavant dans le film Wayne’s World.
Le morceau de bravoure : Custard Pie – Helmet & David Yow
For The Masses – Depeche Mode (1998)
Depeche Mode est un groupe à part dans l’histoire du rock. Car capable d’enchaîner les hits radio tout en conservant une véritable légitimité dans la scène plus underground. C’est là tout le talent de Martin Gore, très mis en avant puisque le hasard a voulu que les participants ne prennent aucune chanson des débuts (la période Vince Clarke / Alan Wilder).
Depeche Mode étant au carrefour des genres (gothic, rock, synth pop, new wave), il était évident que les participants viennent d’autant d’horizons différents.
Ainsi, les Smashing Pumpkins en pleine gestation de leur Mellon Collie (& The Infinite Sadness) proposent un Never let me down again étonnant. Failure s’attaque à sa façon très particulière à Enjoy the silence quand Hooverphonic pose son trip hop sur Shake the disease (une version épurée au possible, assez fantastique). On trouve aussi Locust, Veruca Salt et même les alors-tout-jeunes Rammstein pour une « fersion intus-metal-kolossale » de Stripped, sans oublier The Deftones (To have & to hold) qui n’ont jamais caché leur passion pour la synth music des 80s.
Côté gros rock, Monster Magnet propose une version stoner de Black Célébration, titre sur lequel on aurait attendu un groupe plus goth. Le résultat est pourtant magnifique. Tout comme la version electro arabisante de World in my eyes par the Cure, qui revisite totalement le titre de Depeche Mode.
Et puis il y a la face électronique qui est aussi représentée : Apollo 440 (I feel you) ou encore Meat Beat Manifesto (Everything counts).
Cet album a certainement ouvert le chemin vers Depeche Mode à de nombreux fans de metal ou d’indien rock pour qui le groupe était injustement associé à la pop légère de ses tous débuts, passée au second plan dès Black Celebration.
Le morceau de bravoure : World in my eyes – The Cure
Nativity in Black I (1994) / Nativity in Black II (2000)
Deux albums hommage pour le prix d’un groupe ! Oui, mais quel groupe ! Black Sabbath : LE groupe sans lequel aucun des participants aux deux volumes du tribute album n’aurait peut-être existé. Rien de moins pour décrire l’importance accordée ici au casting.
Tout ce qui se fait du plus bruyant et brillant est présent sur ces disques : Biohazard (After forever), Megadeth (Paranoid), Therapy? En duo avec Ozzy himself ! (Iron Man) Bruce Dickinson alors échappé de Iron Maiden (Sabbath Bloody Sabbath), Ugly Kid Joe mégastar de l’époque (N.I.B) ou encore Faith No More (War Pigs, que le groupe interprétait souvent en live à l’époque, comme en témoigne le Live At Brixton Academy de 1991 d’où est tiré le morceau ici présent).
Megadeth s’offre le doublé en étant présent sur Nativity In Black II (Never say die !), accompagné par Machine Head (Hole in the sky), Godsmack (Sweet leaf), System Of A Down (Snowblind), Pantera (Electric Funeral), Slayer (Hand of doom) ou Monster Magnet dont le style est directement inspiré par le Sab’ (Into The Void), comme Cathedral (Solitude) sur le volume I.
Un peu plus aventureux, cette deuxième livraison propose un duo inattendu : Ozzy sur Iron Man, comme sur le volume I, mais cette fois avec le rappeur Busta Rhymes !
Le morceau de bravoure : Black Sabbath – Type O Negative
Plays Metallica by four cellos – Apocalyptica (1996)
Qui connait un peu Metallica sait à quel point le groupe de San Francisco veille au grain et à son image. Surprise et très fort intérêt, donc, lorsqu’en 1996 débarque ce disque ovni : trois violoncellistes finlandais et un batteur reprennent Metallica en instrumental, qui plus est en version classique.
La réaction du toujours bavard Lars Ulrich, batteur du groupe de heavy metal, ne se fait pas attendre : il devient le meilleur attaché de presse d’Apocalyptica, expliquant à longueur d’interview combien il apprécie cette réappropriation de son travail. A tel point que l’album des Finnois sert de musique pour faire patienter les spectateurs lors des concerts de Metallica.
Le traklisting fait la part belle au Metallica de la très grande époque, laissant de côté les mésestimés et alors récents Load et Reload.
L’interprétation apporte une lecture nouvelle à des morceaux lus dans un premier temps à travers leur violence pour en tirer une finesse que l’on pouvait pressentir sans l’imaginer aussi importante.
Apocalpytica va poursuivre les reprises sur les albums suivants, y incorporant d’autres groupes comme Faith No More ou Sepultura, avant de proposer ses compositions propres.
Surtout, ce disque va ouvrir la voie à de nombreux autres projets crossovers rock-metal / classique, souvent plus produits, marketés, pour ne pas dire indigestes mais qui n’auront pas l’aura de ces précurseurs. Et Plays Metallica by four cellos restera un album fondateur !
Le morceau de bravoure : Enter sandman
The Black Sweden – Rock Tribute to ABBA (2000)
ABBA, le strass, les paillettes, les morceaux disco-pop ancrés dans les 70s et la période disco, c’est difficile de les imaginer en rock songs.
Pourtant, le pari est réussi pour The Black Sweden, dont on ne sait pas trop qui se cache derrière. Le groupe a pris un pari double : faire sonner ABBA comme un groupe de hard rock ET proposer des intros en forme de mashup entre le groupe suédois et quelques classiques du metal !
Autant le dire tout de suite : le pari est plus que réussi. Les rétifs à ABBA peuvent y voir une porte d’entrée miraculeuse. Mamma Mia sur l’intro du tout aussi mythique Smoke on the water : ça passe et très bien. Take a chance on me sur l’intro de Enter Sandman (Metallica), pareil. Dancing Queen dopée au Ballroom blitz : encore un succès. Etc, etc.
The Black Sweden fait littéralement péter les guitares et la basse et on sent chez le groupe un plaisir fou et simple à reconstruire les chansons d’ABBA. Et comme les rockeurs sont aussi (surtout) de sacrés romantiques, ils transforment The winner takes it all en chanson unplugged à se rouler des pelles après avoir avalé une pinte de bière cul-sec !
Le morceau de bravoure : Smoke on the water /Mamma Mia
Stoned Immaculate – The Doors (2000)
Album étonnant puisqu’il a aussi servi de casting pour former le groupe The Doors Of The XXI Century. Robby Krieger et Ray Manzarek ont voulu repartir sur les routes propager la bonne parole de Jim Morrison (John-Paul Jones, lui, ne s’est pas associé au projet). Au moins l’un des deux musiciens intervient sur chaque morceau, accompagné d’un guest.
Où l’on trouve pêle-mêle Aerosmith (Love me two times), Days Of The New (L.A Woman), The Cult (Wild Child), Bo Diddley (Love her madly), Stone Temple Pilots (Break on through).
Et donc, ce disque a fait office de casting, deux des chanteurs présents : Ian Astbury (The Cult) et Scott Weiland (Stone Temple Pilots) étant pressentis pour accompagner Krieger & Manzarek. C’est finalement Ian Astbury qui remportera le poste, Scott Weiland étant déjà en proie à ses démons cocaïnés.
Les reprises sont fidèles à l’oeuvre des Doors, avec ce supplément qu’apporte chaque chanteur. Mention spéciale, sans trop de surprise, à Steven Tyler qui est capable de transformer toute chanson existante en morceau d’Aerosmith, et à Ian Astbury sur un Touch me encore plus sensuel que l’original !
Le morceau de bravoure : Touch Me – Ian Astbury (avec la participation à la basse de John Densmore / The Who)
Strange little girls – Tori Amos (2001)
De Tori Amos, le grand public connait surtout son premier succès : Crucify, et son talent de pianiste. Mais la douceur apparente (il n’y a qu’à lire les paroles de Crucify pour s’en convaincre) cache un tempérament plus que rock. Tori Amos va notamment collaborer sur son album suivant, Under the Pink, avec Trent Reznor (Nine Inch Nails) proposer un duo à Maynard Keenan (Muhammad my friend).
Et en 2001, alors qu’en concert le public l’a déjà entendue reprendre Smells like teen spirits de Nirvana, martyrisant ou caressant les touches de son piano, Tori Amos propose un album entier constitué de reprises.
Et pour le public, c’est une grosse claque : loin de quelques covers très convenues, on se retrouve ici face à un exercice de style impressionnant. Tori Amos prouve sa connaissance de plusieurs genres musicaux, un talent véritable à se réapproprier les chansons et un tempérament de rock star.
Si Enjoy the silence de Depeche Mode apparaît presque évident, que dire de Raining Blood de Slayer ? Les rois du trash repris au piano !!!! Par une voix douce et féminine ??? Hé bien ça fonctionne et apporte une dimension nouvelle, presque plus insidieuse, à la chanson ! A l’opposé du trash metal, le rap, et Miss Amos de se fendre d’une version étonnante du ’97 Bonnie & Clyde d’Eminem. Lady Tori laisse son inspiration la guider aussi vers les répertoires de Neil Young (Heart of gold), des Boomtown Rats de Bob Geldof (I don’t like mondays), ou Joe Jackson (Real Men) et le Velvet Underground (New Age).
Tori Amos ne s’est ici fixée aucune limite si ce n’est son plaisir, à travers un concept de reprises via des doubles virtuels transposés en photos où le public l’aperçoit tour à tour punkette, rockeuse ou diablement vamp.
Le morceau de bravoure : Raining blood – Slayer
https://www.youtube.com/watch?v=4PWgA3PI7VQ
We shall overcome : the Seeger Sessions – Bruce Springsteen (2006)
Bruce Springsteen s’est un jour fendu d’un album de reprises. Et il s’est attaqué à un monument : Pete Seeger, le pionnier de la musique folk américaine. Et venant d’un artiste comme Springsteen, le mot hommage prend tout son sens. Tout comme l’humilité. Boss redevenu apprenti, il a préparé consciencieusement ce disque. 8 ans se sont écoulées entre les premières sessions et la publication du disque. Entretemps, Bruce Springsteen a entrepris de se renseigner sur la vie du géniteur des 13 titres présents. Comme pour mieux les comprendre, comme pour mieux le comprendre lui, Pete Seeger, référence parmi les référence, tributaire d’un Grammy Award pour l’ensemble de son oeuvre en 1993… et qui viendra en glaner ensuite 3 autres, fait quasi unique !
Le résultat est à la hauteur des attentes des fans des 2 artistes. La musique et les mots de Pete Seeger sont livrés par The Boss avec sa hargne et sa virtuosité habituelles. A tel point qu’on ne sait plus à la fin de l’écoute si l’on a eu affaire à Bruce Seeger ou à Pete Springsteen. La rencontre de deux géants du rock. Un seul regret, tout de même : que les deux hommes n’aient pas partagé le micro.
Le morceau de bravoure : O Mary, don’t you weep
The Art of McCartney (2014)
S’attaquer au répertoire de Sir Paul, faut le vouloir. Et ensuite, faut le pouvoir. Il n’est donc pas étonnant de trouver sur cet album à géométrie variable (simple, double et éditions spéciales dématérialisées, histoire de varier les plaisir et les rentrées d’argent) le top du top, l’Olympe de la pop et du rock.
La simple lecture des intervenants ferait baver tout programmateur de festival qui se respecte et angoisser un éventuel banquier ou assureur…
Lisez par vous-même : Billy Joel, Bob Dylan, Steve Miller, Alice Cooper, Dr John, Smokey Robinson, Barry Gibb, Roger Daltrey, Yusuf Islam, pour les plus connus parmi un ensemble déjà très connu (Perry Farrell, Jamie Cullum, Def Leopard, Samy Hagar, etc.).
Chaque participant vient apporter son univers pour tenter de le calquer sur celui de Macca. Parfois, chose étonnante, on a droit à une révérence trop proche (Eleanor Rigby pour qui Alice Cooper redevient Vincent Furnier, chose rarissime), parfois on s’en va très loin, mais en restant on-ne-peut plus proche (Hello Goodbye par The Cure… en duo avec Paulo !).
Le choix des 34 chansons (sur la version CD double) fait évidemment la part belle aux titres des Beatles, mais le répertoire ultérieur (Wings ou solo) n’est pas oublié. Aux plus connus Live & let die ou Yesterday (sublimé à sa façon par l’inégalable Willy Nelson) se succèdent aussi des titres moins connus (Got to Get you into my life par Perry Farrell / Let’em in par Dr John…). Mais il n’y a pas ici la moindre fausse note : chaque artiste prouve par sa ré-interprétation à quel point la musique de Paul McCartney est universelle !
Rarement l’expression album hommage n’aura aussi bien porté son nom. Tout sonne comme un album de potes, et l’on s’imagine avec gourmandise cette jam session imaginaire en écoutant, fredonnant, redécouvrant des chansons mythiques…
Le morceau de bravoure : Yesterday – Willie Nelson
Serge Gainsbourg
Chez Myskeuds, on est très fan de Serge Gainsbourg. Comment pourrait-il d’ailleurs en être autrement pour qui aime les belles chansons.
Et a priori, nous ne sommes pas les seuls.
Voilà pourquoi nous allons parler ici de trois projets de reprises liés à Serge Gainsbourg !
Intoxicated Man / Pink Elephants / Delirium Tremens / Intoxicated Women – Mick Harvey (entre 1995 et 2017)
4 albums de reprises de Serge Gainsbourg : autant le dire tout de suite, il ne doit pas y avoir de plus grand fan du poinçonneur des lilas que le rockeur australien, ex compagnon de route de Nick Cave au sein des Bad Seeds.
Et qui dit australien dit english-speaking. Vous l’aurez compris, Mick Harvey a entrepris un travail de réécriture des textes et des arrangements.
Entouré à chaque fois d’une équipe nombreuse, Mick Harvey personnalise, adapte, relit tout Gainsbourg, pour lui trouver une sonorité nouvelle. Il y a ici un hommage à la fois humble et direct.
Si sur Intoxicated Man ou Pink Elephants on retrouve de nombreux classiques ( 69 Erotic year, Initials BB, Requiem (pour un con), The Javanaise, Comic Strip, etc.), Mick Harvey prouve dès Delirium Tremens qu’il ne se contente pas de reprendre ce qu’il a pu entendre. Non. Il a écouté Gainsbourg, à outrance même, pour en ressortir les chansons qu’il préfère. Et Delirium Tremens apparait dès lors comme l’album le plus passionnant de cette trilogie, car composé des titres les moins connus de l’ensemble (Deadly Tedium / Ce mortel ennui – I envisage / J’envisage,…).
Le dernier disque, Intoxicated Women fait de son côté la part belle aux muses de Gainsbourg. Et Mick Harvey y laisse volontiers le micro pour des covers des Sucettes (All Day suckers), Puppet of wax, puppet of song (poupée de cire, poupée de son), plongeant une nouvelle fois dans les foisonnantes archives musicales de Serge Gainsbourg.
Rarement un travail de fan aura été aussi sincère et profond !
Le morceau de bravoure : 4 albums de reprises de Gainsbourg en anglais, y’a pas plus grand comme morceau de bravoure !
Great Jewish Music : Serge Gainsbourg (1997)
Le label d’avant garde & musique expérimentale newyorkais Tzadik a été créé en 1995 par le saxophoniste bruitiste John Zorn. Deux ans plus tard, il a publié un album hommage à Serge Gainsbourg à sa façon : totalement barré !
Accompagné de personnes aussi géniales et folles que lui, il réinvente Gainsbourg :
Mike Patton (Faith No More et tant d’autres) part au volant de la Ford Mustang, tandis que Marc Ribot s’attaque au Black Trombone alors que Franz Treischler (The Young Gods) s’offre un Requiem pour un con.
21 titres de Serge Gainsbourg sont ainsi maltraités, façon SM musicale, mais en respectant pourtant au plus haut point l’oeuvre de l’homme à la tête de chou !
Le morceau de bravoure : Requiem pour un con (John Zorn / Franz Treischler)
Monsieur Gainsbourg revisited (2006)
Ce tribute publié en 2006 montre, à l’instar de I’m your fan pour Leonard Cohen que la légitimité artistique d’un auteur/compositeur vient de ses interprètes.
Et sur ce disque, le casting est quasi parfait : Michael Stipe (REM), Tricky, Mark Almond en duo avec Trash Palace, The Rakes, The Kills, Marianne Faithfull, Jarvis Cocker, Cat Power,…
L’album a aussi le double bon goût de laisser chaque artiste réinterpréter Gainsbourg comme il l’entend, proposant ainsi une grande variété musicale. Et surtout, il donne l’occasion de réentendre deux des principales interprètes de Gainsbourg : Dani (en trio avec Feist et Gonzales sur son désormais mythique Boomerang, rebaptisé Boomerang 2005 pour l’occasion), Françoise Hardy (en trio avec Brian Molko – présent aussi avec Placebo- et Faultine, sur Requiem pour un con / requiem for a jerk) et surtout Jane Birkin, qui reprend Sorry Angel (A song for Sorry Angel) avec Franz Ferdinand.
Ce tribute est inégal, passant du génie au kitsch en quelques secondes, mais justement là était l’essence de Serge : de Gainsbourg à Gainsbarre !
Le morceau de bravoure : Jarvis Cocker & Kid Loco : I just came to tell you that I’m going (je suis venu te dire que je m’en vais)
Comment on “Il y a de bons albums de reprises, si si !”