Pour une fois, ce n’est pas un disque qui nous a attirés, chez Myskeuds. Mais un livre, une autobiographie. Enfin, pas tout à fait. Car son auteur n’aime pas les autobiographies.
Son auteur, c’est Jean-Michel Jarre. L’artiste aux concerts les plus fous se raconte à travers les objets qui ont accompagné sa vie : une boite d’After Eight, un magnétophone Grundig d’occasion, une pince à linge…
Véritable cabinet de curiosités, Mélancolique Rodéo permet à Jean-Michel Jarre de rappeler qu’il aime autant les mots que la musique, lui qui a écrit quelques tubes pour Christophe (Les Paradis perdus, Les Mots bleus) ou pour Patrick Juvet (Où sont les femmes ?), avant de lancer sa carrière de compositeur et de magicien de son et de lumière.
Explorateur des sons, précurseur de la musique électronique, ambassadeur de bonne volonté de l’ONU, Jean-Michel Jarre livre avec délicatesse ses souvenirs : ceux de ses nuits à composer, ses rencontres parfois insolites avec les plus grands acteurs de l’histoire mondiale (Jean-Paul II, Lady Diana, l’astronaute Ron McNair et ses équipiers morts dans l’explosion de la navette Challenger, Mick Jagger, Chet Baker et tant d’autres).
Jean-Michel évoque aussi avec pudeur et distance son père, Maurice Jarre. Loin d’un règlement de compte, Mélancolique Rodéo se veut la parole d’un fils, sans rancune particulière, sans revanche autre que ce succès qui a transformé le paradigme « fils de » en « père de ».
Autres personnages centrales (pas une faute, une figure de style volontaire !) de Mélancolique Rodéo : France Péjot, grande résistante, trois fois capturée par les nazis et trois fois évadée et Charlotte Rampling qui fut sa femme et demeure son double, son alter ego.
Jean-Michel Jarre réussit à écrire sa vie avec un regard extérieur, malgré l’emploi du je. Un oxymore supplémentaire pour l’homme dont les parents étaient déjà oxymores. Il ne serait même pas étonnant qu’il réutilise ce terme pour un futur titre d’album. Mais c’est ce regard extérieur, toujours émerveillé, surpris de l’immensité de sa carrière et de sa vie de star qui fait mouche. Car il y a la vie de l’artiste, aux quatre coins du monde et celle de l’homme chez lui, à Lyon, Paris et surtout Croissy. Une vie presque comme les nôtres. Une vie qu’on n’imagine pas forcément pour l’homme qui a révolutionné le spectacle musical mondial.
Mélancolique Rodéo ne se lit pas comme une biographie. Mais comme un roman. Ou comme une succession de nouvelles. Chaque chapitre peut être lu sans lien préexistant avec les autres. Comme un album où l’on fait le choix d’une écoute intégrale ou selon ses chansons favorites.
Et la musique, elle est présente tout au long du livre, c’est assez rare pour être signalé. En fin de bouquin, vous retrouverez la très riche playlist de l’artiste/auteur. Elle fait la part belle à son oeuvre, que l’on comprend par les mots désormais, mais s’en va aussi ailleurs, flirter avec le jazz, le rock progressif, la chanson française, le punk, le metal.
Rare version TV d’Oxygène part.4 par Jean-Michel Jarre en 2012.