Myskeuds est un blog fondé sur une promesse : « j’aime un disque, alors j’en parle » et sur quelques règles assez immuables. Mais des règles que le nouvel album du Boss fait voler en éclat ! Parce que sur Myskeuds, on aime la création artistique. Alors les lives, les albums de reprises, on préfère les laisser à d’autres blogs. Pas qu’on ne les aime pas, bien au contraire. Mais on a fait ce choix.
Sauf que voilà, Bruce Springsteen vient de publier ce Only the strong survive, qui est un album de reprises. Et que, comme ici on aime le Boss, on s’est empressé d’écouter ce disque. Et qu’on a trouvé qu’il sonne tellement Springsteen qu’il est comme un album de création.
A l’instar de Johnny Cash qui a sublimé sur ses American Recordings le travail d’artistes éloignés de son art (NIN, Depeche Mode, entre autres), Bruce Springsteen a réussi à s’approprier très directement ces classiques de la soul music. Il y a quelque chose de logique, d’ailleurs, à ce que la voix de l’Amérique propose son interprétation de la musique de l’Amérique. Du moins l’une des musiques qui ont fait le patrimoine américain, depuis une grosse cinquantaine d’années. Et puis, lorsqu’on écoute les premiers titres de Springsteen (au hasard un 10th Avenue Freeze Out) et quand on se souvient de l’importance des cuivres dans l’histoire du E Street Band (remember le légendaire Clarence Clemons), on se dit que tout coule de source.
On sent déjà que l’interprète s’est fait plaisir. Très plaisir, même. Avec un choix assez exhaustif, qui va des Commodores (Nightshift) à Ben E King (Don’t play that song) en passant par les Four Tops ou The Temptations. Sans oublier l’autre Jersey Boy, l’infatigable Frankie Valli (the sun ain’t gonna shine anymore). Ensuite, tout en respectant les canons de la soul, et notamment l’emploi de cordes, de choeurs et de cuivres, Springsteen leur apporte par sa voix unique un éclairage nouveau.
A l’instar de Western Stars, on sent que Bruce Springsteen a décidé de se faire plaisir avant tout. Comme Western Stars, premier album loin de son univers de working class hero, Only the strong survive risque de diviser les fans. Il y aura ceux, on en fait partie, qui applaudiront à la découverte et au plaisir (tout en préférant, pour notre part, l’album de Paul Stanley publié en 2021). Et ceux qui diront que Springsteen doit d’abord faire du Springsteen. Lesquels auront raison ? Tous. Ou aucun. Car Springsteen a déjà dépassé Bruce Springsteen. Dépassé le E Street Band. Dépassé sa propre légende. Et s’offre des moments de plaisir musicalement solitaire, comme il ouvrirait sa discothèque la plus intime.
Le site officiel de Bruce Springsteen
Springsteen sur Myskeuds ici et là