Il y a un mystère autour de Plume. Un mystère entretenu par les premières notes de « Seek you must« , titre d’ouverture sur lequel ce saxophoniste la joue au toucher, impressionniste des notes. Accompagné par un piano et une section rythmique en parfaite mesure, il nous emmène en promenade, vers les quartiers interlopes d’une mégapole. Londres, Paris, New York ou Tokyo ? Qu’importe. L’essentiel ici est cet équilibre, maintenu sur l’ensemble de l’album. Ce fil invisible qui nous fait pencher entre le luxe et la zone.
Dès la pochette, et le nom de l’artiste, Plume, écrit en lettres gothiques, on se doute qu’on n’aura pas à faire ici à un jazzman de plus. Non, on entre immédiatement dans un univers presque lynchien, à tout le moins proche des mondes parallèles d’un David Cronenberg. BO d’un film pas encore tourné, Escaping the Dark propose une approche à la fois classique par le jeu et innovante par le résultat. Des compositions solides, racées, mélodiques. L’impression globale d’écouter un technicien suffisamment sûr de son art pour se permettre de jouer simplement, avec fluidité, maîtrise et surtout un sens aigu de la mesure.
Escaping the Dark fait de Plume l’anti Kamasi Washington. Là où l’Américain convoque choeurs et cordes, Plume propose un jazz finalement minimaliste, réussissant néanmoins à remplir parfaitement tout l’espace sonore. Chaque morceau s’écoute, voire se lit, s’imagine comme le chapitre d’un reportage sur la nuit. La nuit sombre, la nuit folle, la nuit câline, la nuit obsédante, la nuit apeurante, la nuit silencieuse, ou pas tout à fait. La nuit de tous les possibles.
Les 8 pistes de cet album offrent un voyage immobile, presque hypnotique. Elles proposent autant d’histoires (New Love, Helen’s song, qui s’envole légèrement vers une tension rock…). Plume signe un album déjà incontournable !