Après avoir balancé une discographie idéale (ou pas loin) de Myskeuds l’an dernier, on s’est demandé ce qu’on pouvait faire. Pas mieux, mais différent. Et en regardant ce qu’on a comme disques, on s’est vite dit qu’il y a des pépites inconnues ou méconnues. Parfois parce que les artistes sont obscurs, effectivement. Mais il y a aussi quelques albums méconnus dans la discographie des plus grands. On vous livre donc une sélection de ces albums, à égrener jusqu’à fin août. Prenez autant de plaisir que nous à découvrir tous ces disques !
Sundown – Design 19 (rock gothique)

Premier et meilleur album d’un side project né à la fin des 90s, associant Mathias Lodmalm et Johnny Hagel. Les deux hommes viennent du metal, Cemetary pour le premier, Tiamat, pour le second.
Lassés par le metal (vers lequel ils reviendront ensuite), les deux hommes ont fondé Sundown, du titre du dernier album de Cemetary. Sur Design 19, le duo offre une musique synthétique à souhait, sombre et mélodique. Un disque vénéneux dans la lignée de ce que Depeche Mode aura pu imaginer de plus gothique.
Après Glitter, deuxième album plus orienté indus, le duo se sépare, Mathias Lodmalm reformant Cemetary.
Design 19 demeure aujourd’hui un album essentiel, préfigurateur 20 ans avant du courant synthwave.
Ray Wilson – Change (2003)

Il y aura eu plusieurs vies pour le chanteur écossais Ray Wilson. Une première orientée grunge, alternatif, voire presque metal avec Stiltskin et le tube Inside (1994), puis avec Genesis sur ce qui reste aujourd’hui l’ultime album du groupe, Calling all stations, le seul enregistré après le départ de Phil Collins.
Sur Change, hé bien, c’est le changement. L’apaisement, même. Ce disque marque le départ d’une carrière solo pour Ray Wilson, faite de chansons folk et rock, dans une forme de tradition des chanteurs écossais. Guitare sèche, piano et accompagnement soyeux font de Change un disque immédiatement intemporel.
Scott Walker & Sunn O))) – Soused (expérimental)

Il est loin le temps où Scott Walker et les Walker Brothers, faux frères mais vrai boys band avant l’heure faisaient rêver les demoiselles du Swinging London ! Dès les 80s, le chanteur américain a décidé de laisser derrière lui son passé de chanteur de pop baroque pour explorer le son.
En 2014, il publie donc Soused avec le duo Sunn O))) grand promoteur de la musique drone, ces longues plages hypnotisantes de musique lourde, autant inspirées du noise pur que du metal extrême.
Et Soused apparaît aujourd’hui encore comme une expérience sonique et sonore ahurissante. Walker revient à ses premières amours comme pour mieux les abhorrer et les détruire consciencieusement, laissant Sunn O))) jouer le rôle du bourreau.
Disque extraordinairement exigeant, Soused demeure un ovni, mais surtout une oeuvre d’une richesse qui se découvre détail par détail à chaque nouvelle écoute.
Talk Show – Talk Show (rock psychédélique)

En 97, Stone Temple Pilots vient de finir sa trilogie magique (Core – Purple – Tiny music…) et son leader Scott Weiland est viré du groupe à cause des problèmes de drogue qui lui coûteront la vie quelques années plus tard.
Mais sans lui, hors de question alors d’enregistrer un nouveau Stone Temple Pilots. Les musiciens recrutent un nouveau chanteur (Dave Coutts, Ten Inch Men) pour créer Talk Show.
Si les compositions sont à la hauteur, force est de constater que le charisme de Weiland est bien plus grand que celui de son « remplaçant » d’alors. Il en demeure cependant cette atmosphère glam-grunge que Stone Temple Pilots avait réussi à créer, empruntant aux 70s cette folie sexy pour lui ajouter les canons du grunge (accords bas, etc.).
Talk Show était un ersatz de Stone Temple Pilots. 25 ans après, il en apparaît comme le jumeau oublié, sorte de masque de fer. Mais son charme reste intact.
Reeves Gabrels – Ulysses della notte (rock)

S’il est depuis près de 10 ans le guitariste de The Cure, Reeves Gabrels a débuté sa carrière auprès de David Bowie. D’abord musiciens d’accompagnement, puis coéquipier au sein du navire Tin Machine (le groupe fondé par Bowie pour tenter de retrouver une crédibilité rock au tournant des 90s).
Ulysses réunit d’ailleurs le temps de duos chaque chanteur au guitariste. Sans oublier d’autres invités comme Franck Black (Pixies) ou Dave Grohl (Nirvana, For Fighters, etc.) ou encore Mark Plati, autre collaborateur habituel de Bowie.
La musique est à l’avenant de tous ces invités, entre rock, gothique, expérimentation, avec une douceur nocturne et mélancolique, un disque d’avant-garde aussi, tentant d’imaginer ce que serait la musique du siècle à venir. Si c’est raté pour la prédiction vues les purges actuelles pour nos oreilles, Ulysses demeure un disque unique, une forme d’absolu pop et rock aux couleurs pourpre et noir.
Ian Astbury – Spirit Light Speed (rock alternatif)

Pas rien comme carrière que celle de Ian Astbury, qui aura vu le chanteur britannique succéder à Jim Morrison au micro des Doors (oui, la vraie histoire est un poil plus longue, mais bon, c’est à peu près ça tout de même). Jusque là, Ian Astbury avait fait carrière avec The Cult, groupe émanant de ce courant entre metal, hard rock et rock gothique dans les 80s.
Dans les 90s, le chanteur a mis de côté The Cult, lassé par les tensions au sein du groupe, et avec aussi l’envie de découvrir et expérimenter d’autres musiques. C’est le cas sur Spirit Light Speed, qui mélange le rock initial du chanteur avec des sonorités alors plus actuelles comme la jungle ou le drum’n’bass sur lesquels il pose sa voix profonde et instille son psychédélisme fait de « wouh ouh, wouh ouh », rejoignant la route ouverte quelques années plus tôt par Primal Scream.
Antimatter – Saviour (trip hop)

Alors qu’Anathema a réussi à passer du doom gothique au metal puis au rock prog un peu plus tôt sur le fondamental Alternative 4, Duncan Patterson décide de changer son fusil d’épaule, toujours dans une veine gothique, mais en allant plus vers les musiques électroniques trip hop en tête. En résulte ce premier album, Saviour, réalisé en compagnie de son binôme Mick Moss.
Antimatter parvient à un résultat quasi alchimique sur Saviour, entre musique éthérée, voix féminines laissant imaginer le courant heavenly voices alors embryonnaire et fulgurances rock. Le groupe est aujourd’hui fier d’une discographie de 7 albums, mais aucun autre n’aura le charme si fragile et incandescent de Saviour.
Lucyfire – Lucyfire (rock gothique)

Quelle mouche a bien pu piquer Johan Englund, leader de Tiamat, pour se barrer le temps de ce Lucyfire ? A l’époque, Tiamat est l’un des fers de lance du metal gothique, avec ses albums Wildhoney et A Deeper Kind of Slumber, d’une beauté hypnotique.
En fait, Lucyfire s’éloigne, mais pas trop loin, de Tiamat. Juste le temps de s’offrir un salutaire délire plus foncièrement rock, voire hard rock. Une façon, peut-être, de jouer pour le fun là où la musique de Tiamat appelle à plus d’introspection. Le résultat ? Un album de goth rock à faire pâlir les Sisters Of Mercy, un disque aussi profondément sincère que WTF par rapport à ce que peut représenter la scène gothique pour ses acteurs.
Johan Englund reviendra ensuite chez Tiamat poursuivre une carrière toujours sans la moindre faute.
Coverdale Page – Coverdale Page (hard rock)

Voilà qui a tout de l’album a priori suicidaire en tous points : deux dinosaures du rock (Jimmy Page – Led Zeppelin & David Coverdale – Whitesnake) qui s’associent pour un disque de hard rock alors que la planète ne jure que par le grunge. L’album est d’ailleurs publié peu de temps avant le suicide de Kurt Cobain. Ni Led Snake, ni White Zeppelin, Coverdale Page c’est la rencontre avant tout de deux amoureux du rock. De deux hommes qui ont voulu laisser leurs légendes respectives derrière eux pour s’offrir un disque intemporel, signe tout de même d’une époque (le hard glam) qui s’éteint. Et surtout deux voix, l’une purement vocale, l’autre guitaristique, qui se répondent, dialoguent tout du long de l’album. La critique, à l’époque, a même émis l’hypothèse non pas d’un retour du Zep sous une autre forme, mais du disque qui s’en rapprochait le plus par son ambiance ésotérique générale.
Dans une interview récente, David Coverdale a par ailleurs fait part de son désir de retravailler avec Jimmy Page. Pour un Coverdale Page II ? To be continued… du moins, on l’espère.
Blind Fish & David Hallyday – 2000 BBF (grunge)

Hé oui, David Hallyday. Celui de Tu ne m’as pas laissé le temps et autres chansons. Parce que David Hallyday a d’abord eu une carrière de jeune premier (He’s my girl, High) avant de retomber dans un relatif anonymat pour le grand public. Mais dont il a usé pour bosser sur deux albums qui ont alors eu les faveurs de la presse rock et metal, notamment en Grande Bretagne pour son groupe suivant, Novacaine.
Ici, avec Blind Fish, David Hallyday s’offre des fulgurances indie rock avec un guitariste alors sacré « champion de guitare grunge » (bon, pour ce que ça peut valoir, hein…).
Mais tout l’album baigne dans une atmosphère californienne 90s avec des chansons qui tiennent vraiment la route, et pouvaient sans aucune honte rivaliser avec les canons indie pop et rock de l’époque.
Bad Lieutenant – Never cry another tear (pop rock)

En 2006, New Order, l’un des groupes phares des 80s annonce sa dissolution. Soucis entre Peter Hook, bassiste, et les trois autres membres du groupe, dont deux (Bernard Sumner et Phil Cunningham) vont fonder ce Bad Lieutenant. Groupe auquel sera associé le temps de quelques morceaux de cet unique album Stephen Morris, batteur de New Order. Avec également la présence d’Alex James, bassiste de Blur.
Et le style Bad Lieutenant n’a strictement rien à voir avec New Order, encore moins avec Joy Division, le mythique groupe dont était issu New Order.
Ici, c’est une ode à la brit pop en 12 chansons : guitare-basse-batterie et voix pour des titres entraînants ou mélancoliques, peu de fioritures, mais juste l’envie de se retrouver entre amis pour jouer, composer, s’amuser et partager. Et quand on a talent et expérience en plus, ça donne ce disque brillant !
El Presidente – El Presidente (pop rock)

Si Gun a eu un gros succès dans les 90s, jusqu’en France (la reprise du Word Up de Cameo), la fin de la décennie a raison du groupe dans sa première mouture. Split, départ du chanteur Mark Rankin et besoin pour les uns ou les autres de se refaire une virginité musicale. C’est le cas de Dante Gizzi (bassiste) qui va créer El Presidente au retour d’un voyage en France. Et de la basse, passer au chant, avec une voix étonnante, à la fois sexy, faussement cassée et aigüe. Et un parti pris : mettre du fun et du psychédélisme dans ce rock qui, autrefois, virait entre punk et alternatif, voire metal.
Le résultat, c’est cet unique album et quelques singles qui sont encore régulièrement diffusés aujourd’hui en radio, signe de leur grande qualité.
Depuis, Gun s’est reformé, avec un nouveau chanteur… Dante Gizzi, dont El Presidente aura servi finalement de tremplin pour passer de la basse au micro.
Lodestar – Lodestar (fusion)

Au milieu des 90s le groupe Senser a fait jeu égal avec The Prodigy, en terme de fusion entre rock, metal, hip hop et electro. Un album essentiel, Stacked Up, puis un second disque, Asylum, en 1998. Mais entre ces deux albums, des tensions sont nées entre les différents membres et trois, parmi eux, ont décidé de se barrer pour fonder Lodestar. Ce nouveau groupe, ou side project, ne publiera qu’un seul disque : Lodestar. Un album dans lequel la folie Senser est plus canalisée vers le rock et le metal alternatif que sur Senser, où les éléments électroniques apportaient une touche plus personnelle.
Il en reste ce disque sur lequel l’influence va plus vers Faith No More, ne serait-ce qu’à cause d’une forme de ressemblance entre le chanteur Heitham Al Sayed et le mythique frontman américain Mike Patton.
Musicalement, c’est de la fusion, genre totalement à la mode à l’époque, proche par moment d’Asian Dub Foundation (Salter’s duck), et à d’autres moments des Américains Helmet (Wait a minute).
Martin & James – Martin & James (pop)

Duo écossais, Martin & James est composé de Martin Kelly et James O’Neill. Ce dernier est le fils de Jimme O’Neill, leader des Silencers, l’un des groupes phares de la scène pop rock écossaises des 80s, au côté de Simple Minds, Wet Wet Wet ou Big Country.
Le duo propose sur ce qui est à l’heure actuelle leur seul album une collection de pop songs mélancoliques, à l’image de leur single, Tides, qui fait hérisser très haut les poils, même les plus ras.
Duo vocal, leur album s’en ressent avec cette double harmonie, quand ce ne sont pas des parties de ping pong, l’un et l’autre se répondant.
Il y a quelque chose d’agile aussi, quelque chose qui vient de cette culture des pubs si forte en Grande Bretagne : on propose la musique la plus luxuriante possible dans une économie d’instruments.
Martin & James, l’album, est de ces disques qui se découvrent avec agréable surprise pour ensuite s’écouter très très souvent avec un bonheur jamais démenti.
Engine – Engine (metal)

A la fin des 90s, le nu metal a pris le pas sur l’ensemble de la scène musicale alternative. Dans la foulée de Korn, on ne compte alors plus les groupes signés 13 à la douzaine par les labels, sous couvert de trois accords et un look bankable.
Au milieu, il y a des musiciens qui comprennent l’évolution musicale, mais surtout qui viennent déjà du metal. C’est le cas d’Engine, groupe créé par le chanteur de Fate’s Warning, Ray Adler, avec des membres d’Agent Steele ou Armored Saint. Autant dire qu’ils prennent le problème nu metal par l’autre versant.
En résultent deux albums, dont ce Monster, à la richesse musicale sans commun, si ce n’est à l’époque avec les leaders du mouvement qu’étaient Korn et Deftones. Ligne mélodique impeccable, vraie voix typique métal, arrangements riches, assez proches par moment de ce que propose le grunge, alors en coma et proche d’être débranché. Finalement Engine a créé sa voie, celle d’un nu metal prog. C’en était peut-être déjà trop pour les kids de l’époque qui commençaient à tourner un peu trop autour des biscuits mous…
Mindset – A bullet for Cinderella (nu metal)

Mindset représente l’exemple parfait du groupe dont le succès correspond à une époque, le nu metal. Leurs deux premiers albums ont été des cartons, notamment ce A bullet for Cinderella, avant que le soufflet ne retombe. Malgré plusieurs tentatives dans les années 2000, la magie de l’instant sera passée.
Pourtant, sur ce disque, à commencer par le single Sorry, Mindset offre une musique au groove terrible, quelque part entre le grunge et l’indie rock, mais avec cette production typique du nu metal d’alors. L’influence de Tool est notable sur quelques morceaux (il faut dire que Aenima tout juste sorti quelques mois avant aura une influence considérable sur la scène rock), tout comme celle des new-yorkais Helmet.
Et c’est ce qui fait le charme d’A bullet for Cinderella : avoir réussi à capter le meilleur de l’indie de l’époque pour le compiler sur ses propres chansons. C’est peut-être aussi ce qui a perdu le groupe, quand la mode a tourné…
Justin Sullivan – Navigating by the stars (folk)

Justin Sullivan, leader et chanteur de New Model Army, a publié cette année un très beau Surrounded. L’occasion en cet été de nous replonger dans son premier album solo, sorti en 2003. Il constituait alors son premier pas hors son groupe, et déjà pour retrouver une forme de simplicité folk. Alors, oui, la folk est une composante essentielle de la musique de New Model Army. Mais sur ses disques solo, Justin Sullivan va à l’épure extrême. La guitare, quelques choeurs épars pour la grandeur et la profondeur de champ (et de chant), mais surtout la voix et les textes en communion avec l’auditeur. Comme s’il voulait fendre l’uniforme du général qu’il est chez New Model Army pour ne laisser affleurer que l’homme, le poète, de façon directe.
Navigating by the stars est ainsi une collection de 14 folk songs qui doivent autant à Leonard Cohen qu’à Nick Drake. Mais surtout à Sullivan lui-même, certainement l’un des auteurs et interprètes les plus inspirés du rock britannique.
Masters Of Reality – Deep in the hole (stoner)

Et si le stoner prenait un accent bowiesque ? C’est le pari, volontaire ou non, de Chris Goss sur cet album de Masters Of Reality publié en 2001. Chris Goss, c’est l’un des hommes forts de la scène grunge, soit avec son groupe, soit à bidouiller les boutons pour les autres. A son palmarès, on notera la trilogie magique et fondatrice de Kyuss, un album pour Melissa Auf Der Maur, le Rated R de Queens Of The Stone Age (et Era Vulgaris), ou encore Bubblegum pour Mark Lanegan…
Bref, le garçon a du talent à revendre et quand est publié en 2001 cet album, Deep in the hole, c’est une dimension pop et même glam qui est apportée au stoner, un peu comme si ces « bouseux » quittaient leurs oripeaux pour une veste scintillante. Le résultat est bluffant tant l’énergie psychédélique du stoner est ici magnifiée (3rd man on the moon / Counting horses, moment d’une délicatesse infinie).
Helmet – Betty (metal alternatif)

Balancer un album comme Betty au moment où le grunge pleure encore Kurt Cobain, c’est un coup de poing. Helmet a eu un premier succès en 1992 avec Meantime, brûlot metal/rock/hardcore imparable. Mais à la différence de ses concurrents, Page Hamilton, leader du groupe, est un musicien très très doué, et surtout très cultivé. Alors, sur Betty, il n’hésite pas à balancer des plans et une technique jazz au service d’une musique que certains qualifieront de hardcore. Le résultat est un disque brillant, tout en chausse-trappes, dès la pochette montrant cette jeune fille « belle des champs » ultra 50s, à mille lieues du propos du disque.
Betty va dérouter les fans de la première heure, mais offrir à Page Hamilton son plus gros succès en single (Milquetoast) grâce à la B.O. magique de The Crow. Ensuite, Hamilton laissera tomber quelque temps Helmet pour mieux collaborer avec Bowie, Therapy?, Wire ou encore Nine Inch Nails. Avant de mieux reformer Helmet, mais aussi un projet de pur jazz, The Page Hamilton Quintet.
The Mars Volta – De-loused in the comatorium (rock progressif)

Fondé sur les cendres encore chaudes d’At The Drive In, groupe de hardcore/fusion totalement barré, le duo The Mars Volta (Cedric Bixler-Zavala / Omar Rodriguez-Lopez) balance ce premier album qui ressemble à pas grand chose. Ou si : une orgie auditive entre Led Zeppelin, Carlos Santana, Franck Zappa et Hüsker Dü ! C’est lourd, c’est rock, c’est intense, c’est latino, c’est barré… bref, un album génial, qui aura ensuite 5 frères tout aussi barrés, sans compter les escapades solo encore plus folles d’Omar Rodriguez-Lopez, jusqu’à la réformation à la fin des 10’s d’At The Drive In.
Peeping Tom – Peeping Tom (fusion)

Mike Patton est un sorcier. Capable de muter selon ses envies. Du rock fusion de Faith No More au hardcore metal de Dead Cross en passant par la fusion metal/jazz de Master Bungle et quinze mille autres projets et genres.
Là, c’est l’approche hip hop, affleurée par moments par Faith No More, qui le tente. Alors, il s’associe à Rahzel, l’un des Human beatbox les plus connus et talentueux. A côté, un groupe qui balance une musique entre funk métallique et soul ultra-sirupeuse. Rahzel balance ses beats, pendant que Patton joue de sa voix comme il a pris l’habitude de le faire pour John Zorn ou Björk.
Le résultat est un disque OVNI halluciné et hypnotique.
Porcupine Tree – Lightbulb Sun (rock progressif)

Beaucoup ont découvert Steven Wilson via Porcupine Tree et le génial Stupid Dream, qui met OK Computer de Radiohead sérieusement à l’amende.
Un an plus tard sort Lightbulb Sun, sorte de jumeau ou de suite directe à Stupid Dream, comme une façon de boucler la boucle pop de l’aventure Porcupine Tree avant de plonger dans un côté plus metal sur In Abstentia.
Lightbulb Sun est en conséquence un album trop souvent oublié dans la discographie protéiforme de Steven Wilson. Mais recèle quelques uns de ses plus beaux morceaux, parmi les plus directs aussi. Comme le titre éponyme, mais aussi 4 chords that made a million, la mélancolique Shesmovedon ou la pièce prog absolue qu’est Russia on ice.
Cette doublette Stupid Dream / Lightbulb Sun préfigure la musique que Wilson proposera en solo à partir d’Insurgentes, 9 ans plus tard, le temps de finir l’aventure Porcupine Tree sur des albums à la magie beaucoup plus sombre.
Echobrain – Echobrain (rock alternatif)

Quelques mois après son départ surprise de Metallica, Jason Newsted, bassiste du groupe, annonce la publication du premier des deux albums de son nouveau projet, intitulé Echobrain. Après une vingtaine d’années passées dans le heavy metal, voire le trash metal entre Flotsam & Jetsam et Metallica, c’est un tout nouveau Jason Newsted qui débarque. Echobrain est à mille lieues de ce qu’on connaissait alors de lui : un album d’indie rock dans la lignée de Dinosaur Jr ou Sugar. Bref, pas metal du tout. Mais sincère de bout en bout dans sa démarche et son envie de tourner la page, lui qui aura connu entre 1987 et 2001 l’ascension de Metallica, de groupe de heavy metal à monstre du rock, capable de tutoyer ou dominer dans les Charts les Madonna, U2 ou Whitney Houston.
Là, c’est un redémarrage à zéro, un album entre potes, une forme d’exorcisme aussi, peut-être. Et on découvre un côté folk inattendu pour celui qui était idolâtré parmi les meilleurs bassistes metal jusqu’alors.
Bruce Dickinson – Balls to Picasso (metal)

C’est l’album de la discorde pour de nombreux fans d’Iron Maiden… Celui pour et par lequel Bruce Dickinson a quitté le groupe au début des années 90, après ce qui reste la plus grosse tournée du groupe, Fear of The Dark, et plusieurs millions de spectateurs à leurs concerts. Si des soucis d’ordre relationnel sont à inclure à cette décision, il n’en demeure pas moins que Dickinson a envie d’autre chose, musicalement. Ce qu’il fait sur Balls to Picasso, qui voit Bruce Dickinson réaliser une forme de rêve américain, avec un heavy plus typé LA de l’époque que prog/NWOBHM comme pouvait l’être Maiden. Cette respiration offre des moments précurseurs du néo metal (comment ne pas reconnaître Korn et son Freak on a Leash dans Cyclops ?!?). Plus généralement, c’est un album de ce qu’on appelait à l’époque le groove metal que propose Bruce Dickinson. Qui n’en oublie pas ses premières amours avec le final, une chanson devenue intemporelle, à la fois metal, prog (on dirait du Marillion), folk et ultra populaire : Tears of the dragon.
Blackfire – One nation under (punk/world)

Un frère, une soeur, et deux mondes : celui du punk rock et celui de la civilisation navajo. En musique, ça donne des albums à l’image de ce One nation under : des disques forts, un supplément d’âme, des intermèdes tribaux, psalmodiés au milieu de morceaux de pur punk rock guitare/basse/batterie bruts et entraînants. Où l’on comprend, à travers ces quelques chants sacrés toute la force de la musique, du son et de la parole, quand bien même on ne comprend pas la signification, juste l’importance du propos.
Blackfire n’est plus aujourd’hui, remplacé par un autre groupe, mais avec les mêmes membres, et nommé Sihasin. La musique s’est un tout petit peu adoucie. Mais le propos reste noble et original. Et surtout, il a conservé cette âme de transmission par le son.
Blaze Bayley & Thomas Zwijsen – Nylon Maiden

Blaze Bayley, ou l’homme qui divisa les fans d’Iron Maiden, coupable selon certains d’avoir pris la place encore fumante de Bruce Dickinson. Deux albums avec Maiden, puis retour à une forme d’anonymat. Blaze Bayley est surtout un chanteur d’une puissance rare et un homme d’une gentillesse infinie.
Contacté par le guitariste belge Thomas Zwijsen, il revisite avec lui en acoustique son répertoire, qu’il soit issu de ses années Maiden ou de ses autres projets (Wolfsbane, Bayley, etc.). Le résultat est bluffant de sincérité, d’amour pour la musique. Blaze Bayley confiera que ce projet lui a permis d’appréhender différemment ses chansons, d’en être véritablement l’interprète plus que le simple chanteur.
L’exercice va d’ailleurs ici au-delà d’un simple unplugged. Le talent guitaristique de Thomas Zwijsen et la présence d’un violon sur certains morceaux changent totalement leur identité, les magnifient, démontrant que dans le rock, l’électricité ne fait pas tout.
Dub War – Wrong side of beautiful

Dès le milieu des années 80, la fusion commence à disséminer partout dans le rock. A Washington, Bad Brains ose mélanger hardcore et reggae, et bientôt en Californie, Faith No More et les Red Hot Chili Peppers vont marier, parfois contre nature mais presque toujours avec succès le rock, le metal, le funk, le hip hop, voire le jazz pour le groupe san-franciscain. En Europe aussi, à l’image des Néerlandais Urban Dance Squad, la street culture et le rock s’acoquinent.
Dub War, de son côté, vient du Pays de Galles. Et propose ce mélange détonnant à la Bad Brains, avec un chant typiquement reggae appuyé par des déflagrations punk/metal et quelques légères touches hip hop et électro. Le résultat est un album inspiré, Wrong Side of Beautiful, lancé par le single Enemy Maker.
Séparé, puis reformé en partie sous le nom Skinred, Dub Par demeure l’un des groupes les plus explosifs des années 90, nanti d’un savoir-faire rare pour passer en un accord du hardcore au dub avec un sens mélodique pop.
E- A Man called E

E, alias Mark Everett, alias Eels. Mais ici E, dans son tout premier album, publié en 1991. 4 ans donc avant la formation de Eels, groupe dont il est le seul membre permanent.
Et 4 ans avant la déferlante Novocaine for the soul, Mark Everett publie donc ce premier album, A Man Called E. Un disque dans son époque, marqué à la fois par la brit pop venue de Manchester (Happy Mondays & co) et par la coolitude de la Californie qu’il vient de rejoindre depuis sa Virginie natale. Si ce disque est plus policé que les suivants, on y trouve tout de même les germes de la folie Eels qui se poursuit depuis, et jusqu’au sublime dernier, Earth To Dora. Mais la forme d’innocence du débutant qui entoure A Man Called E en fait un disque très à part dans l’ensemble de son oeuvre. Un disque plus pop, plus accessible, plus premier degré surtout, peut-être. Mais un disque indispensable pour comprendre l’histoire de Eels et sa pop baroque et foutraque à souhait.
Head Cat – Walk the walk, talk the talk

Lemmy Kilmister était un amoureux du rock’n’roll. Hard, metal, il n’en avait cure et jurait que Mötörhead ne faisait rien d’autre que du rock’n’roll.
Alors, pour pousser le bouchon de cérumen un peu plus loin, il a créé ce projet parallèle, The Head Cat, en compagnie de Slim Jim Phantom (The Stray Cats) et du guitariste Danny Harvey.
Ici, pas de distorsion, pas d’explosion guitaristique, mais une poursuite du chemin rockabilly emprunté par les pionniers du rock. Plus qu’un exercice de style, les trois musiciens ont la passion du rock des débuts, celui d’Eddie Cochran, d’Elvis et des autres grands noms.
Walk the Walk, Talk the Talk est un album épuré, rafraîchissant, tant on sent le plaisir des musiciens de se retrouver pour le simple bonheur d’une jam session. Mais attention, on a ici à faire à des spécialistes et des techniciens : rien ne dépasse, la folie n’empêche pas le professionnalisme et donc chaque note, chaque accord à sa place, sans fioriture.
Contrairement à Mötörhead, The Head Cat a survécu au départ de Lemmy, fin 2015. C’est aujourd’hui David Vincent, leader du groupe de death metal Morbid Angel qui lui a succédé au micro.
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